Le gouvernement du Canada doit laisser les scientifiques faire leur travail. C’est le titre d’une lettre ouverte publiée il y a 2 semaines par la Société royale du Canada, un organisme âgé de 130 ans qui n’a pas beaucoup l’habitude des prises de positions politiques. Ce qui a motivé celle-ci, c’est un problème, déjà vieux de quelques années, généralement résumé par les mots : «bâillonnement des scientifiques». Ceux à l’emploi du gouvernement fédéral subissent un encadrement extrêmement rigide chaque fois qu’arrive une demande d’entrevue de la part d’un média —au point où, dans plusieurs cas, il est carrément impossible pour les journalistes de leur parler.
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Des cas absurdes ont été relatés dans la presse, comme, en 2010, ce scientifique à Ressources naturelles Canada, Scott Dalimore, qui s’est vu interdire d’accorder des entrevues pour sa recherche sur les changements climatiques... d’il y a 13 000 ans. Ou ce journaliste du Ottawa Citizen qui, en 2012, a vu sa demande d'une information passer par 11 personnes à Ottawa —et sans résultat— tandis qu’il lui a suffi de 15 minutes à la NASA.
Ces cas d’ingérence ou de «musèlement» sont également dénoncés depuis trois ans par le syndicat regroupant les scientifiques à l’emploi du gouvernement fédéral, l’IPFPC.
Mais depuis le printemps dernier, un autre dossier l'occupe, plus immédiat, celui des coupures dans les recherches réalisées au sein du gouvernement. Deux cas parmi d’autres :
- la fermeture de 5 laboratoires de Pêches et océans Canada chargés de surveiller la pollution des milieux marins et les cours d’eau, annoncée le printemps dernier et dénoncée par une lettre ouverte signée par 200 scientifiques;
- et la fermeture d’un pan de recherche appelé Région des lacs expérimentaux, unique en son genre dans le monde; depuis 1968, 58 lacs servent de baromètre de la façon dont la pollution se répand dans les cours d’eau et les lacs d’eau douce; cette fermeture a été dénoncée le printemps dernier par des scientifiques d’un peu partout dans le monde, et jusque dans les pages de la revue britannique Nature en mai 2012.
Plusieurs observateurs ont souligné combien ces coupes semblaient avoir une préférence pour les recherches liées à la protection de l’environnement. Cela rend doublement difficile d’avoir des scientifiques, au sein du gouvernement fédéral, qui acceptent d’en parler. Peter Ross est une exception —et il perd bientôt son emploi.
Nos invités :
- Peter Ross, chercheur à l’Institut des sciences de la mer de Pêches et océans Canada, en Colombie-Britannique. Expert des mammifères marins et des polluants qui les affectent, il a appris en mai dernier que la totalité de son programme de recherche allait disparaître.
- Jeremy McNeil, secrétaire aux affaires internationales de la Société royale du Canada, et entomologiste à l’Université Western Ontario.
- Peter Bleyer, chef des communications et des politiques de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada
En musique : Il faut que tu saches, par Fred Pellerin.
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Je vote pour la science est diffusée le mardi à 11h à Radio Centre-Ville (102,3 FM Montréal) et disponible sur iTunes. Vous trouverez sur cette page des liens vers les émissions des saisons précédentes. Pour en savoir plus sur l'initiative Je vote pour la science, rendez-vous ici. Vous pouvez également nous suivre sur Twitter.