Les scientifiques qui dénoncent le Président Bush se recrutent décidément de plus en plus haut. Après des étudiants, des blogueurs, des médecins, des chercheurs et des Prix Nobel, voici l’ex-« médecin en chef » des États-Unis.

« La réalité, c’est que le « médecin de la nation » a été marginalisé et relégué à un niveau où il ne dispose d’aucun budget indépendant, avec des superviseurs qui sont nommés pour des raisons politiques, avec des ordres du jour partisans », a déclaré mardi, 10 juillet, le Dr Richard H. Carmona devant un comité de la Chambre des représentants.

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Ex « médecin en chef » ou Surgeon General, c’est un des plus hauts fonctionnaires du ministère de la Santé, après le Secrétaire à la santé (ou ministre). C’est en tout cas le plus visible de tous les intervenants de ce méga-ministère. Et il n’est pas « ex » depuis si longtemps : le Dr Richard H. Carmona a été nommé à ce poste par George W. Bush en 2002, et y est resté jusqu’en 2006, au terme de son mandat de quatre ans.

Va-t-il jusqu’à parler de censure? Il n’emploie pas ce mot, mais le résultat final est le même : « tout ce qui n’entre pas dans les cadres de ces (superviseurs), que ce soit idéologique, théologique ou politique, est ignoré, marginalisé ou simplement enterré ».

Le Comité de la Chambre des représentants sur les réformes gouvernementales a voulu entendre le Dr Carmona, de même que ses deux prédécesseurs, parce qu’il songe à proposer de faire du poste de médecin en chef un poste indépendant des pressions politiques.

Depuis 2002, nombre de scientifiques se sont plaints de l’ingérence du gouvernement Bush dans la science, ingérence qui aurait atteint un niveau inégalé dans l’histoire. L’Agence Science-Presse en a parlé régulièrement :

- les études tendant à prouver que le réchauffement est bien réel sont marginalisées, et les budgets consacrés à l’environnement sont de toutes façons réduits (voir ce texte) - les études qui appuient une future réglementation des pesticides et autres produits toxiques sont écartées ou systématiquement mises en doute; - si on parle de maladies transmissibles sexuellement il faut de préférence parler d’abstinence plutôt que de condom; - jusqu’au sein de l’administration elle-même, des organismes comme la NASA ou la National Oceanic and Atmospheric Administration ont été pris à partie pour avoir muselé certains de leurs propres scientifiques ou retardé sciemment la publication de certaines données; - Une lettre a été signée par 48 Nobel et des rapports ont été publiés par des organismes scientifiques neutres ou engagés, comme l’Union of Concerned Scientists.

Mais que la nouvelle attaque vienne du médecin en chef n’avait pas été prévu. Jusqu’en 2006, le Dr Carmona a été le fidèle porte-flambeau des politiques de la santé aux États-Unis. Le rôle du « Surgeon General » est en effet d’être « le chef-éducateur sur la santé », celui qui a pour mission de « fournir aux Américains la meilleure information disponible sur la façon d’améliorer leur santé », lit-on sur son site web.

Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’entre 2002 et 2006, pendant que les uns tempêtaient sur les ratés de l’information à propos du sida ou de l’obésité infantile, et que les autres protestaient contre les interdits imposés à la « pilule du lendemain », le Surgeon General était singulièrement discret dans son rôle « d’éducateur »...

Son successeur aura à choisir lequel des deux Dr Carmona, le discret ou le critique, il suivra comme modèle...

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